« Je l’ai frappé avec un poteau, a déclaré, face caméra, un homme arrêté par les forces de l’ordre le 25 mai 2018. J’avais bu un décilitre de vodka dans un bar avant et je ne bois jamais de vodka… alors ça a été violent pour moi ». C’est ainsi que cet individu de 37 ans originaire de Voronej (467 kilomètres au sud de Moscou) a expliqué son attaque contre la toile d’Ilia Répine Ivan le Terrible et son fils Ivan le 16 novembre 1581 au sein de la Galerie Tretiakov, l’un des plus grands musées de Moscou.
Cette œuvre datant de 1885 dépeint le tsar russe affligé, tenant le corps inerte de son fils dans ses bras après l’avoir tué accidentellement (les historiens débattent encore aujourd’hui de la véracité de ce fait). Le vandale a causé trois trous dans le tableau et cet incident est malheureusement loin d’être le seul cas où une peinture a été endommagée suite à une attaque de ce type en Russie ou impliquant des Russes.
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Dès le début de son existence, cette toile a connu quelques troubles, puisque déjà en Russie impériale elle est a fait l’objet d’une certaine amertume. « Le public se plaignait que l’image leur donnait le vertige, et une rumeur disait qu’Ilia Répine avait perdu l’usage de sa main après l’avoir peinte », rappelle en effet Dmitri Boutkevitch, observateur artistique pour le journal Kommersant.
En 1913, Abram Balachov, un jeune homme n’ayant auparavant montré aucun signe de maladie mentale, a lacéré la toile à l’aide d’un couteau en hurlant : « C’en est assez du sang ! ». Les restaurateurs et Répine en personne ont alors travaillé sur l’œuvre durant des mois, cachant finalement ses « blessures ». Or, comme en témoignent les faits, même 100 ans après, peu de choses ont changé et le tableau semble encore faire polémique.
Cette œuvre d’art de Rembrandt a été acquise par Catherine II pour figurer à l’Ermitage, et a paisiblement été conservée dans ce musée saint-pétersbourgeois jusque 1985. Cette année-là, Bronius Maigys, un citoyen soviétique venant de Lituanie, a projeté dessus de l’acide sulfurique avant de lui porter plusieurs coups de couteau.
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Son motif s’est cependant avéré ambigu. Il a tout d’abord prétendu que c’était son moyen de soutenir l’indépendance lituanienne vis-à-vis de l’URSS, mais il a ensuite affirmé que de manière générale il était contre la nudité dans l’art. « Selon les médecins, il avait en réalité un problème psychique conduisant à une obsession le poussant à combattre l’+obscénité+ », a précisé le site Fontanka.ru.
Maigys a par conséquent dû passer 8 ans dans un asile psychiatrique. Pour ce qui est de Danaé, cela a pris 12 ans pour réparer le mal : les restaurateurs ont cependant réalisé l’impossible, sauvant l’œuvre, qui peut à présent être admirée à l’Ermitage, protégée par une vitre blindée, juste au cas où.
Les gens peuvent devenir dangereux quand ils sont contrariés… et une femme russe l’a parfaitement prouvé en 2009, lors de sa visite au Louvre, à Paris. Selon elle, les autorités locales avaient refusé de lui accorder la citoyenneté française, et c’est pourquoi elle a… jeté une tasse en terre cuite sur cette célèbre toile de Léonard de Vinci. Bien évidemment, cela ne l’a pas aidé à obtenir la nationalité.
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Ce n’était pas la première fois qu’un assaut était lancé à l’encontre de Mona Lisa. En 1956, un visiteur avait en effet jeté de l’acide et un autre une pierre. Ainsi, en 2009, le musée s’était bien préparé et la tasse n’a pas porté atteinte à l’œuvre puisque celle-ci était protégée par une vitre blindée. La vandale a de son côté rapidement été appréhendée par la police et relâchée quelques jours plus tard.
L’incident impliquant l’œuvre de cette icône de l’avant-garde russe du XXe siècle est survenu en 1997. Alexandre Brener, un artiste russe polémique, s’est rendu à Amsterdam, où il a réalisé à l’aide d’une bombe de peinture un symbole $ vert sur cette toile.
Pour lui, il s’agissait d’un acte symbolique portant en dérision l’art mondial obsédé par l’argent. « J’ai crucifié le dollar, comme Jésus », a-t-il écrit, prétendant ironiquement qu’il s’agissait d’une œuvre conjointe avec Malevitch. La cour néerlandaise n’a cependant pas approuvé son geste, et a envoyé Brener derrière les barreaux, exigeant de lui qu’il paye une amende de 10 000 dollars.
Cette affaire s’est toutefois plus ou moins bien terminée pour tout le monde, puisque le symbole « dollar » s’est avéré facile à enlever et Brener a trouvé la prison locale « libérale et rationnelle ».
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Lorsqu’une exposition des travaux du photographe américain Jock Sturges, qui prend généralement pour sujet des familles nudistes, et donc des enfants dénudés, a été apportée en Russie durant l’automne 2016, cela a offensé de nombreux politiciens et mouvements conservateurs. Ces derniers l’ont en effet considérée comme « pornographique », ou tout du moins provocante.
Le scandale a atteint son apogée en septembre 2016, lorsqu’au sein de la galerie des Frères Lumière, à Moscou, Alexandre Petrounko a projeté sur les clichés un liquide non identifié (possiblement de l’urine, bien que le vandale ait affirmé lui-même qu’il s’agissait de « boue thérapeutique »). L’homme a été placé en garde à vue durant 8 jours et malheureusement l’exposition s’est vue forcée de fermer ses portes, avant de les rouvrir fin 2017.
Pour en savoir plus sur le récent acte de vandalisme contre la toile de Répine, retrouvez notre article à son sujet.
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