Paul Éluard et son épouse Dominique en URSS
Anatoli Garanine/SputnikSuivez Russia Beyond sur Telegram ! Pour recevoir nos articles directement sur votre appareil mobile, abonnez-vous gratuitement sur https://t.me/russiabeyond_fr
Dans La Prisonnière du Caucase, une comédie cinématographique de 1967, le personnage principal Chourik s’est laissé enivrer à son arrivée dans cette région montagneuse du sud de l’Union soviétique. Saoul, il assiste à l’inauguration du nouveau bureau d’État civil où seront désormais célébrés les mariages.
Il décide de porter un toast aux femmes, se retourne et s’en prend à la vache qui se trouve juste derrière lui. Il lui saisit les cornes et lui ordonne : « Rends-moi la corne, je te dis de me rendre la corne, les deux même ! », pensant dans son délire qu’elle lui avait repris celle dans laquelle il avait bu quelques instants plus tôt.
Il serait une erreur de croire que seuls les peuples du Caucase buvaient ou boivent encore du vin dans des cornes. Des fouilles archéologiques, des sources écrites et iconographiques nous apprennent que les Scythes, les Thraces, les Grecs, les Celtes, les Germains et les Anglo-Saxons les utilisaient.
Tapisserie de Bayeux
Dennis Jarvis from Halifax, Canada (CC BY-SA 2.0)Chez les peuples du monde grec, la corne à boire est étroitement liée au mythe de la corne d’abondance (qu’elle soit celle de la chèvre Almathée qui nourrissait Zeus ou celle qu’Héraclès avait arrachée à Achéloos).
Corne à boire conservé au Musée historique d'État de Moscou
Russia BeyondSi leur usage est le même, la corne à boire ne doit pas être confondue avec le rhyton. Celui-ci est un vaisseau en forme de corne en corne naturelle, argile, métal ou verre dont les deux extrémités sont ouvertes. Le liquide y est versé par la plus grande et bu par la plus petite. On peut généralement les poser pour que leur contenu ne s’écoule pas.
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Les cornes de nombreux animaux conviennent pour la fabrication de ces vaisseaux : auroch, bouc, taureau, bison et même antilope. Celles des béliers sont souvent trop courbées pour faire des cornes à boire. Elles servent toutefois à fabriquer des cornes pour le décor des tables.
La première étape de la fabrication des cornes à boire est celle de la recherche des cornes elles-mêmes. Dans les régions montagneuses comme le Caucase, on peut les prélever sur les cadavres d’animaux morts dans des avalanches.
République du Daghestan, 1978
A. Zybine/SputnikAprès avoir choisi les cornes, les artisans les font bouillir pour ramollir le tissu organique qui les tapisse à l’intérieur. Ils le retirent ensuite avec un grattoir. Ils remplissent les cornes d’eau bouillante pour que les morceaux de pellicule restants se décollent. Cette opération permet également de désinfecter une nouvelle fois l’intérieur des cornes.
Une fois les cornes propres à l’intérieur, elles sont d’abord poncées puis polies avec une patte molle.
La dernière opération est celle de l’application de l’ornementation métallique. Elle peut être en argent (pour les cornes d’où l’on boira), en vermeil, en maillechort, en laiton. Ces parties métalliques autour de l’ouverture des cornes et à leur extrémité peuvent être rehaussées d’incrustations en os. Une chaînette peut être ajoutée.
À l’époque soviétique, d’autres matériaux que la corne naturelle étaient utilisés pour fabriquer ces récipients : argile, métal ou verre.
Il existe deux types de vaisseaux : les cornes qui servent uniquement à la décoration de la table (en géorgien : doki et soura) et les cornes individuelles d’où l’on boit (le terme générique en géorgien est khantsi).
Une corne individuelle a une capacité comprise entre 0,5 / 0,7 et 2 litres. Comme elle ne peut être posée sur la table, les hôtes et leurs convives n’ont d’autre choix que de la boire jusqu’au bout, pas forcément d’un trait !
République de Kabardino-Balkarie, 1974
Markelov/SputnikEn Géorgie, la corne à boire est un élément essentiel du rite de passage auquel sont soumis les garçons de 16 ans. C’est à cet âge qu’il doivent vider une corne à boire remplie de vin. Ce vaisseau est aussi un cadeau que les hôtes offrent à leurs convives.
L’étudiant en ethnographie Chourik avait abusé de l’alcool dès son arrivée dans le Caucase parce qu’il avait fait confiance à l’employé de la réception de son hôtel prêt à lui déclamer les toasts que les hommes portent traditionnellement lors des banquets. De toute évidence, ce jeune homme « allergique à l’alcool » aurait eu bien du mal à faire honneur à son hôte s’il avait été invité à des agapes telles que les Caucasiens savent les organiser.
Dans cette autre publication, découvrez les dix plus grands groupes ethniques du Caucase russe.
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