Jenia était encore jeune quand il est arrivé à Moscou pour travailler à l’usine, mais a fini par être renvoyé. Lilia a quitté son domicile après s’être fait battre violemment par son mari, alors qu’elle n’avait nulle part où aller. Esma, qui a vécu au Tadjikistan jusqu’à son 63ème anniversaire, a été forcée de fuir son pays en raison de l’instabilité politique, mais personne ne l’a accueillie à Moscou.
Toutes ces personnes ont fini dans les rues de la capitale russe. « Ont fini » de manière littérale, puisqu’à présent elles ne sont plus de ce monde. Moscou compte de nombreux sans-abris (les statistiques officielles avancent le nombre de 13 000, tandis que des sources indépendantes tablent sur 60 000) et sortir de cette situation semble incroyablement difficile.
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Il existe plusieurs organisations travaillant avec les SDF : des volontaires leur apportent de la nourriture, les aident à trouver un abri pour l’hiver, passent du temps avec eux. Friends on the Streets est l’une de ces structures, et elle organise chaque année une cérémonie commémorative en hommage à ceux qui n’ont pas survécu à la période hivernale.
« Lors de ce service funèbre, le nom des personnes décédées est lu à haute voix », indique la page internet du projet nommé « Autrefois vivait ici, créé par le portail web Takie Dela. Car avoir des funérailles sans qu’un nom soit reconnu est terrifiant. Ce n’est pas humain ».
« Autrefois vivait ici » est disponible en russe et en anglais. On peut y voir de courts récits animés et interactifs basés, actuellement, sur l’histoire de cinq personnes ayant réellement existé et ayant durement lutté pour leur survie dans les rues de Moscou. Ils étaient tous soutenus par les volontaires de Friends on the Streets.
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Le destin de ces individus n’est pas facile à voir : certains sont morts de froid lors de l’un de ces rudes hivers que connait la Russie, d’autres ont été battus à mort au cours d’une nuit. Et pourtant, ces récits sont empreints de beauté et incroyablement touchants.
Comme Sergueï Karpov et Galia Mossalova de Takie Dela l’expliquent : « Notre principal but est de toucher, de briser l’indifférence ». Selon eux, l’aspect animé est particulièrement important pour que le message se répande, puisque cela atteint le subconscient du spectateur, peu importe sa langue ou sa culture.
Ce projet a en outre été sélectionné pour faire partie des finalistes du concours international de photojournalisme World Press Photo 2018, a rapporté l’agence de presse TASS. Les noms des vainqueurs de cet événement seront annoncés le 12 avril.
Même si la vie dans les rues de Russie est loin d’être évidente, certaines personnes qui ont été forcées d’y élire domicile parviennent à trouver un sens à leur existence. C’est le cas de ce Saint-Pétersbourgeois s’improvisant guide touristique.
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