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Longtemps, l’indication du nom des rues et la numérotation des immeubles ne furent pas tant nécessaires aux habitants des villes, qui connaissaient leur quartier et y orientaient facilement les étrangers, qu’à la puissance qui levait l’impôt. C’était d’autant plus vrai que de tels panneaux ne pouvaient être utiles qu’aux rares personnes qui savaient alors lire.
Outre le goût, semble-t-il prononcé, de Catherine II pour l’ordre – il se fit sentir dans la réforme urbanistique qu’elle décréta en 1763 – l’amélioration de la collecte de l’impôt explique la décision qu’elle prit en 1785 de faire numéroter « toute maison ou bâtiment ou endroit ou terrain se trouvant en ville ». Les plaques étaient alors en bois.
La publication en 1793 du Répertoire de Moscouprouve que la volonté de l’impératrice fut respectée. Y figurent dans l’ordre alphabétique les noms des propriétaires avec le numéro qui fut attribué à leur bien et l’adresse de celui-ci. Un plan de la ville complète la liste.
Dans le courant du XIXe siècle, les registres du Conseil municipal et de la Police où était consignée la numérotation des biens immeubles de Moscou montrèrent des différences de plus en plus grandes. Comme on le voit sur cette plaque en plâtre qui date des années 1860-1890, celle appliquée par la Police était précise.
Cette adresse est aujourd’hui le 6 de la rue Soljenitsyne, dans le quartier de Taganka.
Il n’était pas rare que les propriétaires fortunés apposent sur leurs maisons des plaques où étaient inscrits leur nom et, éventuellement, un des numéros qui leur avaient été attribués.
La densification du bâti dans les zones déjà construites et l’élargissement de la ville rendirent difficile la tenue des registres de la police et de la municipalité, dont les divergences remettaient l’utilité en cause. Cette plaque, qui se trouve aujourd’hui au 25/20 de la rue Chtchepkinе, dans le quartier Miechtchanski, illustre particulièrement bien l’ampleur du problème. On y voit non seulement la double numérotation de l’immeuble, mais aussi le changement de numéro attribué par la police : 212 était le nouveau et 190 l’ancien. Une nouvelle réforme s’annonçait donc.
En 1881, les fonctions de la police moscovite furent révisées. Pour qu’elle puisse remplir les obligations qui lui incombaient désormais, il fallut établir un plan détaillé de la ville qui reproduisait fidèlement le tracé des voies. Les résultats de ce travail de cartographie considérable furent présentés l’année suivante. S’ensuivit la pose dans toutes les voies de plaques indiquant leurs noms. Les bâtiments furent alors numérotés par rue. On raconte que certains propriétaires refusèrent de voir attribuer à leurs biens immobiliers le N°13. De cette même époque datent les côtés pair (сôté droit) et impair (côté gauche) des rues. La numérotation commençait du côté de la voie le plus proche du Kremlin. Les noms des propriétaires figuraient sur les plaques en caractères plus gros que ceux des numéros. Ces panneaux indicateurs étaient généralement en métal émaillé.
En 1908, le Conseil municipal de Moscou recommanda qu’il ne reste sur ces plaques que le numéro du bâtiment, les informations sur leurs propriétaires étant souvent erronées du fait qu’ils avaient vendu leurs biens.
L’année suivante, ce même Conseil prit une nouvelle résolution destinée une fois encore à unifier le système et à faciliter l’orientation des Moscovites et de ceux qui se rendaient dans la seconde ville de l’Empire pour des raisons diverses. Il disposa que sur tous les bâtiments soit apposée une plaque qui porte le numéro de la voie, le nom de la voie (ou éventuellement du propriétaire de l’immeuble). Cette plaque devait être éclairée de la tombée de la nuit à deux heures du matin au moins. Le Conseil municipal donnait un an aux propriétaires possédant un bien dans le périmètre formé par les boulevards et deux ans aux autres pour se conformer à cette « décision dont l’application avait un caractère obligatoire ». L’éclairage des plaques avait été introduit à Moscou à la fin du XIXe siècle sur le modèle de ce qu’il était dans la capitale : une lampe au kérosène était fixée à côté du panneau indicateur en métal.
Le 10 juillet 1935 fut adopté le plan général de reconstruction de Moscou. Il prévoyait, entre autres, l’agrandissement et l’organisation du territoire urbain selon un plan radial.
Sa mise en œuvre avant, pendant (la construction du métro de Moscou continua durant le conflit) et après la Grande Guerre patriotique exigea de revoir une fois encore le système de numérotation des immeubles. En octobre 1940, le Conseil de Moscou (Моссовет – Mossaviète) formula de nouvelles règles à ce sujet.
Quand un bâtiment était construit à la place de deux ou plus (le plan de 1935 prévoyait la destruction de très nombreuses baraques en bois), le nouvel immeuble recevait le plus petit numéro de ceux qui avaient été démolis.
Dans le cas contraire – celui où plusieurs immeubles étaient construits à la place d’un seul –, les nouveaux recevaient le même numéro que celui avait détruit suivi des lettres A, Б, etc.
Par ailleurs, les numéros doubles séparés par le signe / sur les bâtiments situés à des intersections firent leur apparition. Le premier numéro est celui que l’immeuble porte sur la voie la plus large des deux.
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Le principe de numérotation des voies moscovites n’a pas changé depuis 1940. En revanche, l’aspect des plaques a radicalement évolué. Le passant attentif remarque facilement la coexistence de panneaux d’époques différentes, parfois même sur un même bâtiment.
Dans les années 1950, les panneaux ressemblaient encore à ce qu’elles étaient au début du siècle : les noms des rues étaient inscrits en caractères noirs sur fond blanc ou en caractères blancs sur fond bleu. Les numéros des immeubles étaient toujours ronds et éclairés.
À la fin des années 1960 apparurent de nouvelles plaques de numérotation des bâtiments : toujours blanches, elles étaient maintenant carrées.
Une innovation de taille marqua la fin des années 1970. Les plaques en métal émaillé furent progressivement remplacées par des boîtiers en plastique de couleur crème sur lesquelles les inscriptions étaient noires. Les boîtiers qui indiquaient le nom des rues étaient éclairés de l’intérieur.
Ce système fut conservé dans les années 1980, mais les inscriptions étaient désormais bleues.
Aujourd’hui, ce code de couleurs est toujours en vigueur. Dans le centre de Moscou, les panneaux ont souvent un fond bleu et des inscriptions blanches. Les boîtiers des noms des rues sont rectangles ou presque rectangles (dans ce cas, un des côtés les plus larges sont incurvés). Les numéros des bâtiments sont inscrits sur des boîtiers soit ovales, soit carrés. Dans les rues particulièrement touristiques, les plaques sont parfois brunes.
Dans un passé récent, on pouvait lire le nom des rues du centre de Moscou en russe et dans une transcription latine trop compliquée pour être utile. Aujourd’hui, les noms des rues sur les bâtiments doivent être uniquement donnés en russe. La transcription, dont les règles ont été simplifiées, reste présente sur les panneaux bleus qui indiquent les directions.
En 2012, une partie de la région de Moscou (Московская область – Maskovskaïa oblast’) d’une superficie équivalant à 2,4 fois celle de Moscou a été administrativement rattachée à la capitale. L’installation des plaques de rue moscovite est en cours.
Dans cette autre publication, découvrez dix styles architecturaux que l’on peut observer à Moscou.
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